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Le choix des solutions — l’électricité hors pointe

1 Sep 2008    3 min.

La bonne énergie à la bonne place, c’est d’abord la bonne solution pour la bonne application. Depuis plusieurs années, une croyance populaire veut qu’il soit plus économique de gérer l’énergie en transférant des charges thermiques vers la portion hors pointe électrique. Plusieurs projets d’économie d’énergie ont même été réalisés à partir de cette prémisse. Mais est-ce vraiment profitable?

Dans les faits, le gestionnaire d’énergie, qu’il s’agisse d’un propriétaire, d’un chef d’entreprise ou d’un ingénieur, doit se questionner sur les actions les plus efficaces à prendre afin de réduire ses coûts d’énergie au maximum. Le choix des solutions qui s’offrent à lui peut se résumer comme suit: est-il plus économique de maximiser la consommation d’électricité en augmentant celle-ci en périodes hors pointe (85%et plus de facteurs d’utilisation) ou fautil réduire les appels de puissance électrique afin de bénéficier des économies?

Pour chacun des deux scénarios, les énergies fossiles sont habituellement utilisées pour déplacer les charges thermiques. Un cas réel est présenté afin de répondre à cette question. Pour ce client, le gaz naturel est utilisé pour le chauffage du bâtiment ainsi que pour l’eau chaude domestique. L’électricité est utilisée pour répondre aux besoins des commodités tels le fonctionnement des systèmes mécaniques et de la climatisation. Le graphique 1, à la page suivante, nous présente la situation actuelle du client, y compris son bilan énergétique (électricité au tarif M avec un facteur de puissance à 95% et le gaz naturel au tarif D1 avec un coût moyen sur 12 mois).

La solution de la portion hors pointe est représentée par le prolongement des bâtonnets. Celle-ci vise à augmenter la consommation d’énergie électrique, sans augmenter la puissance, afin d’obtenir un facteur d’utilisation de 85%. L’exemple démontre que cette solution exigerait de déplacer un volume de 39785 m3 de gaz naturel à 85%d’efficacité et de remplacer ce dernier par 355914 kWh d’électricité thermique. En tenant compte des tarifs en vigueur, cette solution permettrait de réaliser des économies de 5237$par année. En contrepartie, une telle solution exigerait des modifications coûteuses et majeures aux systèmes mécaniques électriques et souvent aux installations telles que l’entrée électrique.

Une autre solution consisterait à faire, lorsqu’elle peut être appliquée, une saine gestion des appels de puissance. Plutôt que la solution hors pointe, le graphique 2 présente un abaissement de la puissance appelée tout en maintenant le même facteur d’utilisation de 85%. Une fois les impacts calculés, les résultats sont significatifs et parlent d’eux-mêmes. Les économies pour le même client auraient été de 6982$ par année; soit 1745$ d’économies additionnelles annuellement.

Il est donc de première importance pour tout client d’optimiser d’abord les appels de puissance électrique avant d’entreprendre un programme d’économie d’énergie. En effet, ce type de solution obéit à la règle des 80—20, soit 80% des économies sont habituellement réalisées par les contrôles et 20% par les équipements. Inversement, 80%des coûts proviendront des équipements et 20%des contrôles.

Comparatif de coûts

 Coût de l’électricité Coût du gaz naturel Coût total
Situation actuelle 183 682$ 254 435$ 438 117$
Situation avec hors pointe électrique 195 577$ 237 303$ 432 880$
Situation avec gestion de l’appel de puissance 176 700$ 254 435$ 431 135$

La justification de ce résultat est simple, mais souvent mal comprise: la facturation électrique possède deux composantes de coût, soit le coût pour l’énergie et celui pour l’appel de puissance. Lorsqu’on compare le coût unitaire des deux sources d’énergie, il faut toujours se rappeler qu’à chacun des kilowattheures électriques est rattaché une puissance et que l’appel de puissance doit d’abord être réduit à son minimum pour que l’énergie hors pointe soit plus rentable.

Maintenant, ajouter des charges électriques hors pointe, est-ce réalisable ? Peut-on ajouter ces charges électriques sans limitations pour autant qu’un gestionnaire d’énergie vienne soustraire les charges qui pénaliseraient la facturation du client ? Selon le Code de construction du Québec, chapitreV, électricité articles 8-104.4 et 8-104.5, il est interdit de raccorder des charges de chauffage si le raccordement de celles-ci, additionnées aux charges existantes, excède la capacité de l’entrée électrique d’un client, et ce, malgré la présence d’un gestionnaire d’énergie.

En conclusion

Lorsqu’un projet d’économie d’énergie est étudié, l’appel de puissance électrique doit d’abord être réduit à son minimum (optimisé) et pour ce faire, il est préférable de transférer vers le gaz naturel toutes les charges électriques utilisées à des fins de production thermique tels que le chauffage, l’eau chaude ou les procédés.

Enfin, si les appels de puissance ont été optimisés et qu’une mesure visant à utiliser l’électricité hors pointe doit être mise en place, il est important de rappeler qu’il est interdit par les codes d’excéder la capacité de l’entrée électrique. En cas de doute, il est recommandé de faire inspecter les travaux par un représentant de la Régie du bâtiment ou un ingénieur spécialisé en électricité membre en règle de l’Ordre des ingénieurs du Québec.

Roger Gauvin, ing.
Conseiller technique
Groupe DATECH

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