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La récupération d’énergie sur les systèmes de ventilation air-air : l’influence du climat nordique

6 Août 2013    6 min.

Le but premier d’un récupérateur de chaleur dans un climat nord-américain est de minimiser les coûts de chauffage de l’air neuf.

Dans un climat froid, les opérations peuvent s’effectuer sous le point de congélation. Pour protéger et éviter des complications, des moyens de prévention de gel sont utilisés, ce qui diminue l’efficacité des systèmes.

Toutefois, ces moyens de prévention peuvent avoir un impact sur la consommation globale en chauffage, donc sur les frais de fonctionnement.

Performances et conditions climatiques

La récupération d’énergie en hiver se fait entre l’échange de chaleur du fluide chaud (l’évacuation de l’air vicié du bâtiment) vers le fluide froid (l’admission d’air extérieur). Toute bonne conception d’unité doit tenir compte de la possibilité de formation de givre du côté de l’écoulement d’air qui perd sa chaleur lors des températures froides hivernales. Dans ce cas-ci, c’est le côté de l’évacuation de l’air vicié qui se trouve à risque.

Schéma d’échange thermique

La formation de givre sur un échangeur de chaleur réduit sa surface d’échange. Ce faisant, le débit d’air requis du bâtiment peut diminuer, de même que l’efficacité du système de récupération. De plus, il faut aussi prévoir le drainage du condensat lorsqu’il dégèle ou qu’il demeure sous sa forme liquide.

Il existe plusieurs méthodes pour prévenir le givre. Voici les principales :

  • Préchauffer l’air entrant ou sortant
  • Ajouter une voie d’évitement sur l’alimentation ou l’évacuation d’air
  • Mettre des cycles de dégivrage prédéterminés
  • Contrôler la température de l’air évacué à la sortie de l’échangeur vers l’extérieur
  • Faire varier la vitesse de rotation dans le cas d’une roue thermique
  • Utiliser des débits d’air différents entre l’alimentation et l’évacuation

Globalement, ces méthodes permettent d’obtenir une température moyenne acceptable à la sortie de l’échangeur, du côté de l’évacuation. Selon les manufacturiers et le type de récupérateur, les températures recommandées varient entre 33 °F (1 °C) et 36 °F (2 °C).

La température réelle à la surface de contact de l’échangeur n’est pas nécessairement uniforme sur toute sa surface. En effet, des accumulations de givre sont possibles sur certains points de surface dont la température est inférieure à 32 °F (0 °C). Puisqu’une température moyenne est utilisée, la précision de la lecture devient d’autant plus importante, d’où la variation des températures recommandées par les manufacturiers.

Consommation et conditions

Pour une roue thermique donnée, certifiée AHRI, deux (2) paramètres seront évalués dans le cadre de trois (3) conditions différentes afin d’évaluer la consommation réelle :

Paramètres :

  1. Consommation d’énergie avec récupération, sans dégivrage
  2. Consommation d’énergie avec dégivrage à T4 = 36 °F (2 °C) pour simuler une opération en récupération plus réaliste et sécuritaire

Conditions :

  1. CAS 1 (ÉGAUX 2) : 10 000 pi3/min (même débit à l’alimentation et à l’évacuation)
  2. CAS 2 (ALIM. >) : 10 000 pi3/min à l’alimentation et 7 500 pi3/min à l’évacuation
  3. CAS 3 (ÉVAC. >) : 7 500 pi3/min  à l’alimentation et 10 000 pi3/min à l’évacuation

Résultats

Pour tous les cas, l’efficacité de chauffage a été fixée à 90 %. L’efficacité de l’échangeur-récupérateur de chaleur est de type sensible selon les paramètres indiqués dans le tableau ci-dessous. Comme le coût du gaz naturel n’est pas une valeur fixe dans le temps, un coût moyen de 0,50 $/m³ est utilisé afin de simplifier les calculs.

Comparaison des résultats des consommations
Récupération d’énergie avec échangeur1
CAS 1 CAS 2 CAS 32
Alim. = Évac. ALIM. > ÉVAC. > Négatif3 RÉEL4
Débit – Alimentation (pi3/min) 10,000 10,000 7,500 2,500 10,000
Débit – Évacuation (pi3/min) 10,000 7,500 10,000 0 10,000
Consommation sans dégivrage (m3) 11,700 22,900 3,700 19,600 23,300
Consommation avec dégivrage T4=36 °F (m3) 19,500 31,700 6,700 19,600 26,300
Différence de consommation (m3) 7,800 8,800 3,000 0 3,000
Coût de la consommation sans dégivrage 5 850 $ 11 450 $ 1 850 $ 9 800 $ 11 650 $
Coût de la consommation avec dégivrage 9 750 $ 15 850 $ 3 350 $ 9 800 $ 13 150 $
Surcoût direct ($) 3 900 $ 4 400 $ 1 500 $ 0 1 500 $
Surcoût vs Débits égaux ($) 0 $ 6 100 $ -6 400 $ 9 800 $ 3 400 $
Surcoût totaux 3 900 $ 10 500 $ -4 900 $ 9 800 $ 4 900 $
Efficacité – Récupération nominale (% Eff.) 80,2 % 88,7 % 88,7 % 0,0 % 66,5 %
Efficacité saisonnière Dég. T4=36 °F (% Eff.) 75,1 % 59,6 % 88,6 % 0,0 % 66,5 %

Note : Valeurs calculées en fonction des paramètres fournis. L’efficacité tient compte des débits massiques.
Eff= (mA/mM) x (T1-T2) / (T1-T3)    Eff= (mÉ/mM) x (T4-T3) / (T1-T3)

CAS 1 : Débits égaux de 10 000 pi3/min nominaux

Donne une efficacité de récupération nominale de 80 % et une efficacité saisonnière de 75 %. Le surcoût est de 3 900 $ avec le mode de dégivrage.

CAS 2 : Débit d’alimentation plus grand de 25 % que l’évacuation
(10 000 pi3/min côté alimentation et 7 500 pi3/min à l’évacuation)

Donne une efficacité apparente nominale plus grande pour le même récupérateur à débits égaux
(89 % vs 80 %) et une efficacité saisonnière de 60 %, soit 30 % de différence. Le surcoût est de 10 500 $ avec le mode de dégivrage.

Remarque : Il se peut que cette situation se produise plus souvent qu’on le désire, par exemple lorsqu’on ne peut regrouper toute l’évacuation au même endroit.

CAS 3 : Débit d’alimentation plus petit de 25 % que l’évacuation
(7 500 pi3/min côté alimentation et 10 000 pi3/min à l’évacuation)

Comme le débit évacué est supérieur à l’alimentation, le bâtiment devient en pression négative si aucun autre système traitant cette différence n’intervient.

Aux fins de comparaisons, les calculs utiliseront l’hypothèse que la différence de débit sera introduite dans le bâtiment par d’autres moyens et sera chauffé localement à leurs points d’entrées par un système de chauffage conventionnel ayant la même efficacité que celui jumelé au système de récupération. Le bâtiment sera donc soumis à une pression neutre.

Nous avons donc une efficacité apparente nominale plus grande pour le même récupérateur (89 % vs 80 %) et une efficacité saisonnière réelle de 66 % en tenant compte de la portion du débit total ne passant pas dans le système de récupération. Le surcoût est de 4 900 $ avec le mode de dégivrage.

Conclusion

Comme vous pouvez le constater, l’évaluation de la consommation sans mode de dégivrage et avec mode de dégivrage peut donner des différences de consommation significatives.

Pour un même récupérateur, l’efficacité apparente est directement influencée par la différence des débits massiques qui guide l’énergie totale disponible.

Un débit égal entre l’alimentation et l’évacuation apparaît préférable pour récupérer le maximum d’énergie des débits massiques impliqués.

Un débit supérieur en alimentation ne devrait être utilisé que si l’on doit maintenir le bâtiment en pression positive, ou qu’il s’avère non rentable, voire impossible, de rassembler un débit d’évacuation équivalent.

Un débit supérieur côté évacuation peut être intéressant si le bâtiment se maintient en pression légèrement négative. Il faut s’assurer, dans ce cas, que le bâtiment est suffisamment étanche, car l’air manquant cherchera à s’infiltrer et sera finalement chauffé par un système conventionnel, sans pour autant optimiser les capacités d’un système de récupération d’énergie. Puisque le débit massique est supérieur côté évacuation, il permet de repousser un peu plus bas la limite du risque de givre, donc de récupérer un peu plus d’énergie. Comme mentionné précédemment, il faut que le bâtiment soit étanche pour bénéficier d’un tel avantage, sans compter les problèmes potentiels d’opération d’un bâtiment en pression négative (par exemple des portes plus difficiles à ouvrir ou un refoulement de cheminée).

Après toutes ces observations, un climat plutôt froid influence indéniablement la consommation d’énergie due aux cycles de dégivrage requis sur les systèmes de récupération d’énergie.

Richard Meunier, ing., CEM
Conseiller, Technologies et efficacité énergétique
Groupe DATECH

  1. Innergy tech – I3-MS3A-108.
  2. Le cas 3 s’appuie sur l’hypothèse que le bâtiment vise une pression neutre interne.
  3. Le cas 3 suppose que la portion d’air non traitée par le système de récupération pour amener le bâtiment à une pression neutre est introduite dans le bâtiment par d’autres moyens, donc chauffée de façon indirecte sans récupération d’énergie sur cette portion.
  4. Valeurs combinées de la consommation du cas 3 en tenant compte de la portion récupérée et celle compensée indirectement.

Références :

  • Logiciel Winnergy version 3.2 d’Innergy tech
  • AHRI 1060-2005
  • Norme ASHRAE 84-91
  • Environnement Canada – Normales climatiques au Canada 1971-2000 pour Montréal
  • ASHRAE Handbook 2012 – HVAC Systems and Equipment, chapitre 26

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